Le 15 avril 1912, Hudson Maxim – un marchand d’armes qui avait perdu une main en fabriquant des explosifs – se trouvait dans la salle de réception de l’hôtel Ansonia, attendant de pouvoir parler à ‘Abdu’l-Bahá. Il avait un « différend » avec le « prophète de la paix ».

‘Abdu’l-Bahá l’accueillit en lui disant en anglais : « Bienvenue! Je vous souhaite la bienvenue! » Ils ont échangé des politesses, puis Maxim est passé aux choses sérieuses.

« Je crois savoir que vous êtes un messager de paix dans ce pays, dit-il. Quelle est votre opinion sur la guerre moderne? »

« Tout ce qui permet d’éviter la guerre est bon », répondit ‘Abdu’l-Bahá.

« Pensez-vous que la prochaine grande guerre nationale soit nécessaire? », demanda Maxim.

« Pourquoi ne pas essayer la paix pendant un certain temps?, répondit ‘Abdu’l-Bahá. Si on trouve que la guerre est une meilleure option, il ne sera pas difficile de recommencer à se battre; mais si on trouve que la paix ennoblit l’humanité, qu’elle est source de civilisation véritable, qu’elle éveille le génie créatif et qu’elle permet de plaire à Dieu, il faut accepter d’y adhérer et l’établir de façon permanente. »

Maxim tenta une approche différente : « Les combats modernes font moins de morts que les batailles des temps anciens; leur portée est plus large et leur action, moins meurtrière. »

Cela se passait deux ans avant le début de la Première Guerre mondiale.

‘Abdu’l-Bahá invita Maxim à examiner le monde au-delà des limites étroites du champ de bataille, soulignant que « les séquelles [de la guerre] sont encore plus terribles que le choc initial… Le pays souffre bien plus que ce qu’il est possible d’imaginer; l’agriculture est paralysée, abandonnée; les moyens de subsistance font défaut, la pauvreté et la souffrance persistent longtemps après ».

Ce matin-là, Maxim épuisa toute la gamme des mythes du XIXe siècle sur la guerre : la guerre fait partie de la nature humaine; le conflit contribue à une saine évolution sociale; les intérêts économiques éclipseront les rivalités nationales; plus une arme est mortelle, moins son utilisation est probable; la dissuasion est synonyme de paix. « Aujourd’hui, la guerre n’est pas plus dangereuse que l’automobile », affirma-t-il.

‘Abdu’l-Bahá était capable de présenter des arguments convaincants, mais il n’insistait jamais. Il orienta plutôt la conversation vers Maxim lui-même.

« Vous êtes un inventeur célèbre et un éminent scientifique qui consacre son énergie et ses facultés à produire des outils destinés à détruire l’humanité… Il vous est maintenant possible de devenir doublement célèbre. Vous devez pratiquer la science de la paix… Vous devez découvrir des outils de paix; inventer des armes d’amour qui ébranleront les fondements de l’humanité.

Alors, ajouta ‘Abdu’l-Bahá, les gens du monde entier diront que c’est M. Maxim – l’inventeur des armes de guerre, celui qui a découvert de puissants explosifs, le scientifique militaire – qui a aussi découvert et inventé des outils destinés à favoriser la vie et l’amour de l’humanité, qui a mis fin aux conflits entre nations et déraciné l’arbre de la guerre… Alors, votre vie produira de très grands résultats… Dieu sera content de vous et, à tous points de vue, vous serez un homme parfait. »

Traduit de Jonathan Menon, « An Arms Dealer Tries to Sell War to ‘Abdu’l-Bahá »,


Un jour, à Londres, un visiteur posa cette question à ‘Abdu’l-Bahá : « Ce monde malheureux sera-t-il heureux un jour? »

‘Abdu’l-Bahá lui dit : « Il y a maintenant près de deux mille ans que le Christ a enseigné cette prière à son peuple : ‘Que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.’ Pensez-vous qu’il vous aurait enjoint de prier pour quelque chose qui n’arriverait jamais? Cette prière est aussi une prophétie. »

Le visiteur dit : « Mais, ‘Abdu’l-Bahá, quand son règne viendra-t-il? Quand sa volonté sera-t-elle faite sur la terre comme au ciel? »

« Cela dépend, dit ‘Abdu’l-Bahá, cela dépend de l’ardeur avec laquelle chacun de vous sert la Cause jour et nuit. Vous êtes tous des flambeaux que j’ai allumés de mes propres mains. Allez en allumer d’autres jusqu’à ce que tous les serviteurs qui attendent isolément soient reliés dans une grande unité.

Ceux qui travaillent seuls, dit-il, sont comme des fourmis, mais lorsqu’ils s’unissent, ils deviennent semblables à des aigles. Ceux qui travaillent seuls sont comme des gouttes d’eau, mais lorsqu’ils s’unissent, ils deviennent un grand fleuve qui amène l’eau pure de la vie dans les régions désertiques du monde. Lorsque ce grand fleuve de vie débordera, toute misère, toute peine, tout chagrin seront balayés. Soyez unis! Il est dangereux d’être une goutte isolée; elle peut être renversée ou emportée. »

Traduit de Lady Blomfield, The Chosen Highway, p. 171-172


‘Abdu’l-Bahá était invité à donner une conférence à Washington, le soir du 24 avril. Il était très enthousiaste. Tandis que son automobile roulait dans les rues de Washington pour le conduire chez le célèbre inventeur du téléphone, Alexander Graham Bell, on pouvait clairement l’entendre s’exclamer : « Ô Bahá’u’lláh! Qu’as-tu donc fait! Ô Bahá’u’lláh! Puisse ma vie être offerte en sacrifice pour toi! Ô Bahá’u’lláh! Puisse mon âme t’être offerte! Combien tes jours furent remplis d’épreuves et de tribulations! Combien sévères, les épreuves que tu as endurées! Combien solides, les fondations que tu as finalement posées et combien éclatante, la bannière que tu as hissée. »

La veille, Alexander Bell avait personnellement téléphoné pour inviter ‘Abdu’l-Bahá à une rencontre spéciale chez lui. Quelques-uns des scientifiques présents parlèrent, puis l’hôte demanda à Ali-Kuli Khan, un diplomate persan, de leur raconter l’histoire de la foi bahá’íe. Par la suite, il demanda à ‘Abdu’l-Bahá de parler, et lorsque vint le tour d’un autre de ces hommes éminents de s’adresser à l’assemblée, ce dernier dit seulement : « Là où ce prophète venu d’Orient a parlé, mon discours inadéquat n’a pas sa place », et il se rassit. Il était minuit passé lorsque ‘Abdu’l-Bahá se retira.

Adapté de H. M. Balyuzi, ‘Abdu’l-Bahá : Le Centre de l’alliance de Bahá’u’lláh, p. 165


Un jour, après avoir entendu parler d’une bataille tragique opposant les Turcs ottomans et les Italiens en Afrique du Nord, le Maître dit avec une infinie tristesse :

« Ce matin, je ne suis pas heureux. Je suis plein de tristesse. Les nouvelles que le journal nous a rapportées sont telles qu’elles devraient nous angoisser. Les animaux se battent, et quand ils se battent, c’est pour une cause, un but à atteindre…

Le sol est la première et la plus quelconque des choses terrestres créées par la volonté divine – et c’est notre tombe, notre sépulcre, notre cimetière; c’est notre mort, et non notre vie – et ces hommes ne se battent ni pour la liberté ni pour un idéal, mais pour le sol, pour le lieu de la mort, non de la vie…!

Vous êtes un peuple uni pour favoriser l’amitié entre les nations et les races et la fraternité entre les hommes. Alors maintenant, tandis que ces hommes créent la mort, vous pensez à la vie, tandis qu’ils se montrent cruels, vous pensez à la tendresse, tandis qu’ils détruisent, vous pensez à bâtir, tandis qu’ils font la guerre, vous pensez à la paix. »

Traduit de Earl Redman, ‘Abdu’l-Bahá in Their Midst, p. 42-43


Je demande à chacun de vous de concentrer toutes les pensées de son cœur sur l’amour et l’unité. Quand surgit une pensée de guerre, opposez-lui une plus forte pensée de paix. Une pensée de haine doit être détruite par une plus puissante pensée d’amour.

Causeries de ‘Abdu’l-Bahá à Paris, le 21 octobre 1911, p. 36


Une prière de ‘Abdu’l-Bahá

Ô toi, Seigneur de bonté, tu as créé toute l’humanité d’une seule et même souche. Tu as décrété que tous les hommes seraient de la même famille. En ta sainte présence, ils sont tes serviteurs et toute l’humanité s’abrite sous ton tabernacle; ils sont tous réunis autour de la table de ta générosité, illuminés de la lumière de ta providence.

Ô Dieu, tu es bon envers tous, tu subviens aux besoins de tous, tu les protèges tous, tu leur confères la vie. Tu les as tous dotés de facultés et de talents et ils sont plongés dans l’océan de ta miséricorde.

Ô toi, Seigneur de bonté, unis-les tous! Fais que les religions s’accordent et que les nations s’unifient afin qu’ils se voient comme une seule famille et regardent la terre comme un seul foyer. Puissent-ils tous vivre ensemble en parfaite harmonie! […]

Tu es le Fort, le Puissant, tu es le Clément, l’Indulgent qui pardonne les faiblesses de toute l’humanité.

Rencontres avec ‘Abdu’l-Bahá

Lisez ici des prières et des histoires sur l’exemple donné par ‘Abdu’l-Bahá